Un théâtre sur le qui-vive

Parce que le théâtre auquel je crois est en équilibre entre jeu et récit : 

Comment le comédien passe-t-il de la position d’acteur, de moteur de l’action, à la position de récitant, de conteur ? Comment passer de scènes dialoguées, purement théâtrales, à des moments de récit, de monologues des personnages ? Comment tisser ces deux modes de transmission d’un texte ?

Je veux travailler en collaboration avec des auteurs pour chercher cette articulation au sein même de leur dramaturgie.

Parce que le théâtre auquel je crois est en équilibre entre incarnation et distance :

Comment trouver une direction d’acteur qui permette de faire entendre les textes contemporains ? Comment, par la notion de récit, permettre au comédien de se positionner non pas comme un pion manipulé par son texte, mais comme un véritable moteur de l’action en cours ?

Je veux me confronter à cette nécessité du « dedans-dehors » qui doit faire la richesse du théâtre contemporain.

Parce que le théâtre auquel je crois est en équilibre entre les lieux :

Comment réinventer le rapport acteur-spectateur dans une forme architecturale donnée ? Comment éclater les codes de la représentation pour réfléchir au rapport qui s’installe entre comédiens et spectateurs ?

Je veux chercher des lieux de représentations non théâtraux pour interroger ce lien, ou l’interroger à l’intérieur même des théâtres.

Parce que le théâtre auquel je crois est en équilibre entre les écritures :

Comment adapter pour le théâtre un texte qui n’a pas été écrit pour la scène ? Qu’est ce qui fait la spécificité d’un texte dramaturgique ?

Je veux interroger ce rapport entre les différentes écritures, les différents niveaux de langage.

Parce que le théâtre auquel je crois est en équilibre entre ici et ailleurs :

Comment mêler sur le plateau des comédiens de plusieurs provenances ? Y a-t-il une spécificité du jeu selon le pays dont on est originaire ? Le rapport à la scénographie est-il le même que l’on soit Suisse, Camerounais, Américain ou Autrichien ?

Je veux tisser des partenariats avec des compagnies étrangères pour confronter nos regards.

Parce que le théâtre auquel je crois est en équilibre entre les langues :

Comment faire résonner sur un plateau différents idiomes ? Comment les mêler au stade même de l’écriture ?

Je veux chercher à raconter une histoire par d’autres moyens que textuels, parce qu’il est possible de comprendre une émotion sans connaître la langue qui la véhicule…

Parce que le théâtre auquel je crois est en équilibre entre les pratiques artistiques :

Comment faire dialoguer sur un plateau théâtre et musique, théâtre et danse, théâtre et peinture ?

Je veux collaborer avec des praticiens prêts à expérimenter une nouvelle manière de transmettre leur art.

Ce sont ces équilibres, parfois précaires, qui nous font rester sur le qui-vive… Ce sont ces métissages et ces rencontres qui me passionnent dans le théâtre, qui sont et qui ont toujours été mon moteur. Ce sont eux que je veux continuer à promouvoir.